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Depuis 1998, Captures organise des résidences d’artistes collectives et individuelles.
Copyright, Shanta Rao, 2004


ACCUEILLIR ET ACCOMPAGNER UN ARTISTE EN RESIDENCE

 

Résider, c’est une décision personnelle, une démarche humaine. C’est avant tout être accueilli. L’artiste, est à son arrivée, une sorte de corps étranger.
Comment s’intègre-t-il à la vie d’une collectivité ?
À la vie locale ?
Que permet le temps de résidence ?
Par mimétisme, nous assistons à une inflation de manifestations ayant pris la résidence comme mode d’action artistique : festivals, musées, et même centres de loisirs proposent  des résidences. Les conditions de travail sont inégales, et on attend de l’artiste des réalisations concrètes : des expositions ! Comment concilier les attentes des élus, les besoins des artistes, la curiosité des publics ?

Une résidence diffère pourtant de la commande. C’est une prise de risques partagée entre l’artiste, l’institution et le lieu qui l’accueille. C’est oublier l’obligation de résultat. L’artiste n’est pas un enseignant, ni un médiateur, ni un agent social qui va résoudre les carences de nos services publics ! Ces résidences se placent dans les interstices des politiques culturelles et sont souvent une occasion de faire franchir le pas à une population qui ne fréquente pas les lieux de diffusion de l’art.

Nous souhaitons créer au sein de CAPTURES un « espace-temps » où des groupes d’individus, des artistes, des architectes mais aussi des acteurs liés à l’art, peuvent mettre en commun et partager leurs modes de travail, leur réalité, leur aspiration, leur imaginaire. Les artistes invités interrogeront nos rapports au quotidien, à la ville, à la citoyenneté, à l’autre, à l’espace public, la gratuité, le partage, la mise en relation, la possibilité d’être un autre ou d’être ailleurs. Il s’agit de penser la valeur de l’art dans toutes ces dimensions qui ne sont pas uniquement celles du lieu où se produit et se montre l’art ou l’œuvre d’art, mais d’agir, se rapprocher d’une forme d’éducation populaire pour activer les productions d’initiatives ou les transformations possibles de notre environnement.

Quelle intimité amène-t-on avec soi, et quelle est celle qu’on laisse ? L’artiste exprime ainsi son « inconfort ». Il devient alors primordial pour la structure qui l’accueille de l’aider à reconstruire un réseau d’intimité. Dans un lieu où chacun rentre chez soi, sauf lui ! L’équilibre est fragile entre l’inconfort (en perpétuel déplacement, loin de ses habitudes, de son quotidien, de sa cuisine…) et la disponibilité qui en naît. Le rapport à l’autre devient ce nouveau « confort », qui apparaît dans la pratique de l’art et permet de faire jaillir des choses nouvelles : des possibles.

Ainsi, le véritable accompagnement d’une résidence de création, c’est en permanence lutter contre une forme d’instrumentalisation de l’artiste. C’est renoncer à une volonté d’établir ou d’illustrer un thème, de valoriser le patrimoine d’un territoire, de refaire le travail qui figure sur le dossier de sélection. L’accompagnement, doit  inviter l’artiste au décentrement. C’est-à-dire de prendre en compte un autre centre d’intérêt que lui-même, d’intégrer à son processus de création : les préoccupations de l’Autre.